Cafés félins : pour l’amour des chats et des gens
Depuis six ans, l’essor des cafés à chats dans la province fait le bonheur des amateurs d’animaux. Bien plus qu’un endroit où câliner des félins, plusieurs de ces lieux ont une véritable vocation sociale en se vouant au bien-être des chats… et des humains.
Photo : Café Chat L’Heureux
« C’est une approche qui est souvent pécuniaire. Ici, je voulais que ce soit un projet social pour sensibiliser les gens à ce dont les chats ont besoin, à l’aménagement de l’espace pour les chats, à l’adoption en refuge », résume Clément Marty, fondateur du Café Chat L’Heureux, sur la rue Duluth à Montréal. Cet amoureux des animaux a eu l’idée d’ouvrir le premier café félin d’Amérique du Nord en 2014 après avoir visité plusieurs établissements du genre durant des voyages en Corée et au Japon.
La mission est similaire au café Chats-Nous, qui désire conscientiser la population à l’importance d’adopter des animaux dans les refuges. « Notre idée était de donner la chance à un animal en cage d’avoir une meilleure vie et une deuxième chance », explique Christian Audy, copropriétaire de l’établissement qui a pignon sur rue dans le quartier Saint-Jean-Baptiste, à Québec.
La zoothérapie centrée sur le bien-être et la paix
Si le bien-être félin est au cœur du concept de plusieurs cafés du genre, Ma langue aux chats, situé dans le Vieux-Port de Québec, s’est également donné pour mission de soutenir la cause de la santé mentale. Les propriétaires du café, Marie-Pier Tremblay et Lisa Cyr, sont toutes deux des vétéranes des Forces armées canadiennes et souffrent d’un choc post-traumatique. Elles désiraient créer une oasis de paix pour que clients, employés et félins s’y sentent à leur aise.
Toutes les horloges sont arrêtées à 11h11 dans ce café où les gens enlèvent leurs chaussures et où trônent chaises berçantes et tables de patio. « Notre mission est vraiment de permettre aux gens d’être qui ils sont avec nos chats et de promouvoir la santé mentale par la zoothérapie », détaille Lisa, qui emploie des autistes comme stagiaires et qui compte bientôt embaucher un employé atteint du syndrome d’Asperger. Une partie de sa main-d’œuvre revient en outre d’un épisode anxieux ou dépressif. « Le but est de donner la chance à des gens d’être qui ils sont à leur rythme », souligne-t-elle.
Persans, ragdolls, siamois, rex, lynx, bengals et savannahs cohabitent donc chez Lisa et Marie-Pier. Certains d’entre eux portent le nom de frères d’armes morts au combat ou de suicide : Karine Blais, Charles Michaud, Alexandre Péloquin, Karl Manning… Le yorkshire de Lisa est l’un des rares chiens à être admis dans un café félin. « Il connaît les règles. Si les gens entrent avec leurs souliers, il va leur faire comprendre qu’il faut les enlever! », explique-t-elle.
Photo : Café Félin Ma langue Aux Chats
Un contrôle sanitaire strict
Cuisine séparée, lavage de mains obligatoire avant et après avoir touché les chats, protocoles de nettoyage : les règles sanitaires entourant les cafés félins étaient déjà différentes d’un café conventionnel, même avant la pandémie. « La salubrité, c’est un peu le nerf de la guerre », résume Clément Marty. Il explique qu’un aménagement a été fait dès l’entrée dans son commerce pour s’assurer que l’accès à la cuisine, au stockage et à la préparation des aliments soit séparé de l’aire où vivent les chats.
« Même avant la COVID-19, le lavage des mains était plus important pour nous que dans la plupart des commerces. »
Même son de cloche au café Ma langue aux chats, où Lisa Cyr explique que la seule différence depuis le début de la pandémie est le port du masque obligatoire et la distanciation physique de deux mètres. « Nos clients se lavaient déjà les mains avec de l’eau et du savon! », dit-elle.
Pour Christian Audy, la pandémie aura même « donné un coup de main » pour faire comprendre aux clients l’importance des règles sanitaires. « C’est rendu la norme, peu importe l’endroit où l’on va. Quand on a ouvert, il fallait l’expliquer », constate-t-il, indiquant que le lavage des mains permet d’éviter la transmission potentielle de parasites entre les chats et les humains. « Nos animaux n’ont pas de parasites, mais le but est de tendre vers le risque zéro. »
La cause animale à l’honneur
Afin de garantir une expérience optimale tant aux clients qu’aux maîtres félins des lieux, plusieurs cafés sont propriétaires des chats qu’ils hébergent, sans permettre de les adopter. Ma langue aux chats n’hébergeait que des félins de race lorsque Lisa Cyr et son associée l’ont racheté en 2019. Elles ont décidé de poursuivre dans cette voie pour aller de l’avant avec leur approche de zoothérapie. Elles s’occupent aujourd’hui de quatorze minets, dont plusieurs proviennent d’éleveurs familiaux, où les chatons grandissent dans la maison avec des enfants pour favoriser leur sociabilité et leur propreté.
Chez Chat L’Heureux, huit rescapés de l’euthanasie vivent en colocation depuis six ans, cohabitant parfois avec des chatons de passage durant quelques mois. « Entre un chat adulte avec un chaton, il y a un rapport paternel ou maternel, même si ce n’est pas son petit, raconte Clément Marty. Et après ça, on les fait adopter… »
Pour Christian Audy, la question relevait autant de l’ordre sanitaire que de la socialisation des chats entre eux. Pour garder l’ambiance zen de l’endroit, il voulait éviter la rotation fréquente d’animaux, source de grognements et de batailles félines. Christian est aujourd’hui propriétaire de sept chats, dont plusieurs ont été recueillis de refuges. Il met toutefois de l’avant l’importance de l’adoption ; il s’est d’ailleurs associé à l’organisme Mary Sue, un réseau de familles d’accueil pour animaux blessés ou abandonnés.
Café Chats-Nous. Photos : Pascaline Photographie-animalière